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30 octobre 2025La Nouvelle-Calédonie peut-elle instituer une imposition additionnelle ?
Par un jugement n° 24000592 et 2500034 du 4 septembre 2025, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a eu à examiner la question de la création d’une imposition sur les extractions de produits miniers suite aux requêtes de plusieurs sociétés. Ces requêtes ont été rejetées.
Le cadre juridique de la redevance sur les extractions de produits miniers
Par la loi du pays n° 2023-11 du 6 novembre 2023 et la délibération n° 402 du 3 mai 2024 prise en application de celle-ci, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a modifié le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie en instituant une redevance sur les extractions de produits miniers qui est entrée en vigueur le 1er juin 2024.
Par un arrêté en date du 4 septembre 2024, pris en application du nouvel article Lp. 738 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a créé un modèle de déclaration de la redevance sur les extractions de produits miniers.
Par un autre arrêté, en date du 11 septembre 2024, pris sur le fondement du nouvel article R. 736 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, le gouvernement a fixé les modalités de détermination de la capacité d’autofinancement et du ratio d’endettement pour définir une entreprise en difficulté.
Les sociétés minières requérantes ont demandé au tribunal administratif l’annulation de ces arrêtés des 4 et 11 septembre 2024 du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Extraction minière et code des impôts de Nouvelle-Calédonie
Le code des impôts de Nouvelle-Calédonie dispose :
- article Lp. 734 (dans sa rédaction issue de la loi du pays du 6 novembre 2023 instituant une redevance sur les extractions de produits miniers) : « Il est instauré une redevance sur les extractions de produits miniers au sens de l’article R 132-2 du code minier de la Nouvelle-Calédonie ».
- article Lp. 735 : « Le produit de cette redevance est affecté au budget de la Nouvelle-Calédonie. Les communes minières sont autorisées à percevoir des centimes additionnels sur la redevance d’extraction sur les produits miniers. Une délibération du congrès définira les communes minières et fixera les limites des centimes additionnels qu’elles sont susceptibles de percevoir ».
Par délibération du 3 mai 2024 prise en application de la loi du pays instituant une redevance sur les extractions de produits miniers, le congrès a créé plusieurs articles dans le code minier qui :
- définissent les « communes minières »
- prévoient la fixation du tarif de la redevance en prévoyant un tarif par kg de nickel métal, variable selon que le prix de vente par tonne humide est inférieur ou supérieur à 6 200 francs CFP, et un tarif particulier par tonne humide de nickel extrait et valorisé lorsque l’entreprise est en difficulté, en définissant cette dernière notion tout en renvoyant à un arrêté d’application
- autorisent les conseils municipaux des communes minières à percevoir des centimes additionnels sur la redevance sur les extractions de produits miniers dans la limite de 60 centimes
Existence ou non d’une double imposition sur les extractions ?
Les sociétés requérantes soutenaient que la délibération du 3 mai 2024 permettait une double imposition entachée d’illégalité.
Le tribunal a contraire considéré qu’aucune disposition législative ne faisait obstacle à ce que la Nouvelle-Calédonie assujettisse une même quantité de minerai aux centimes additionnels de la commune d’extraction et de la commune de chargement sur un minéralier.
De même, il a jugé qu’aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe ne prévoit qu’un texte relatif aux centimes additionnels doive fixer de façon certaine la collectivité pouvant voter et recouvrer ces prélèvements alors les communes minières concernées sont libres de percevoir ou non les centimes additionnels sur la redevance.
Il ajoute que la perception de centimes additionnels sur la redevance sur les extractions de produits miniers est autorisée, dans la limite de 60 centimes, par les communes sous le territoire desquelles les minerais bruts sont extraits et, de façon alternative ou cumulative, par les communes sur le territoire desquelles les chargements de produits miniers à bord d’un minéralier interviennent.
Le tribunal précise à propos de la différence de traitement invoquée par les sociétés requérantes que :
- d’une part, la seule circonstance qu’une même base imposable serve à la détermination de deux impositions, l’une instituée par une commune d’extraction et l’autre par une commune portuaire, ne saurait à elle seule être constitutive d’une double imposition dès lors que ces impositions sont distinctes,
- d’autre part, si les dispositions attaquées induisent une différence de traitement entre les contribuables, cette différence est justifiée par les contraintes objectives liées à l’utilisation de leur sol et de leurs équipements, qui pèsent, respectivement sur les communes sous le territoire desquelles les minerais bruts sont extraits et celles sur le territoire desquelles les chargements de produits miniers à bord d’un minéralier interviennent.
Le tribunal en déduit que dans ces conditions, la Nouvelle-Calédonie s’est fondée sur un critère objectif et rationnel en rapport avec l’objet de la loi du pays de sorte que le moyen tiré de la violation du principe d’égalité devant la loi des dispositions contestées n’est pas fondé.
Les centimes additionnels sont-ils confiscatoires ?
Le tribunal a considéré que ce moyen invoqué par les sociétés requérantes n’était pas assorti de justifications ou de précisions suffisantes, et ce alors que les centimes additionnels facultatifs n’ont pas pour base le kilogramme de nickel métal ou la tonne humide extraite comme c’est le cas pour la redevance, mais la redevance elle-même.
Dès lors, le moyen n’est pas de nature à établir que le cumul des impositions mises à la charge des sociétés minières atteindrait le seuil du caractère confiscatoire de l’imposition et que le principe d’égalité devant la loi et du principe devant les charges publiques garantis les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen serait méconnu.
Le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a donc rejeté les requêtes des sociétés minières.

